Vers quel futur votre regard se porte-t-il ?

Une petite question d'ordre général sur votre perception des mondes futuristes.
Je ne souhaite pas que vous en restiez à vos lectures ; votre jugement doit aller au-delà, dans vos références cinématographiques, illustrations, BDs, maquettes, etc, etc. Mais aussi dans vos rêves, au plus profond de vous, ce que vous ressentez face à une idée qui se dégage, face à une image que vous voyez, un son que vous entendez... Ce que je voudrais connaître de vous, ce n'est pas ce que vous attendez d'une oeuvre imaginaire, mais bien ce qu'elle vous fait ressentir, et rêver.

Pour faire dans le plus général possible, j'ai découpé en deux grands cas :
- Le futur proche : c'est un peu le futur qu'on verra plus tard, ou que nos enfants verront. C'est le cyberpunk, ça peut être le post-apocalyptique. Ca traite des nanotechnologies, de l'expansion des mondes virtuels, de la robotique, des villes du futur, du clonage, de la conquète spatiale... C'est notre monde avec un plus qui modifiera partiellement ou en profondeur notre vie sociétale. On s'y retrouve plus facilement, dans le sens où ce monde n'est pas si éloigné du notre. D'un autre côté, la place à l'imaginaire est plus restreinte...
- Le futur lointain : l'humanité, voire l'univers, beaucoup plus tard. Fini les projections, l'époque est trop lointaine pour prétendre que ça se passera ainsi. C'est le space opera, c'est notre terre ou l'espace bien après l'expansion de l'humanité. Ou sa chute.

Bien entendu, votre choix est directement lié au fait que vous soyez plutôt visuel, ou audtitif (ou autre chose). Mais ce que je cherche vraiment à savoir, c'est quel type d'univers vous fait le plus vibrer.
Et quand vous fermez les yeux, et que vous décidez de vous éclipser un temps de notre monde, dans quel autre monde vous atterissez...
Votre réponse peut être une liste de références, un type d'univers, une description d'un paysage, d'un monde...
Réponse à rendre sur tablette tridimensionnelle, en trois exemplaires, dûments signés de ses empreintes oculaire et digitale

Je suis souvent déçue par ce qui est censé représenter un futur proche parce que les auteurs pèchent par absurdité, non-connaissance voire bêtise. En revanche, un futur lointain permet toutes les folies, même si la terre est censée exploser...

Voilà qui est une question intéressante.

Afin de vous présenter le fond de mon état d'esprit, la SFF m'a beaucoup lassé ces temps-ci. J'en ai un peu assez de ses schémas finalement assez redondants.

Donc, le futur lointain, comme vous dites, finalement est assez limité. On n'a pas idée de ce que sera le futur, et sans doute il nous décevrait. Avez-vous lu Paris en l'an 2000 de Jules Verne ? Ce type était définitivement génial, parce qu'il parvient à toucher juste sur pas mal de points (il nous décrit que les études littéraires disparaissent peu à peu pour être remplacé par les sciences, l'ingénierie (ce fut assez vrai tant que l'industrie ne se mit pas à être délocalisée), il nous raconte la misère de la vie culturelle actuelle où domine un théâtre fait à la chaine sur commande (cela m'évoquait TF1), mais dans sa globalité Paris en l'an 2000 fut bien moins dramatique que son Paris à lui.

Je ne limiterais pas le futur lointain au Space Opéra, puisque le post-apocalyptique et le cyberpunk y colleraient également (voyez le cycle inachevé du Peuple de Silverberg pour un post-apocalyptique lointain)
[Le post-apo, dès lors que l'apocalypse est passée, contrairement à Ravage par exemple, a l'intérêt d'être assez intemporel, bien que l'actualité en fasse un futur plus pressant]

Mais finalement on est encore collé aux mêmes schémas. Et pour cause, notre imagination a ses limites.

En exemple les sujets proposés ici par Traversées Oniriques dans les différentes catégories, mais en particulier en SF : pour m'y être mouillé, il a été difficile de trouver une voix personnelle. A chacun des sujets que j'ai lu, ma réflexion première, avant toute autre, était : comment tirer le sujet à moi ? Comment faire que ce sujet m'appartienne ? Comment écrire quelque chose qui m'appartienne sur ce sujet ?
Sur Pourvu que la brume ne vienne pas, j'ai essayé de faire ressentir à l'assassin du repentir, tout en incluant cette histoire d'androïdes qui permettait d'ouvrir des possibilités et de surprendre, et dans cette combinaison retomber sur ma réflexion de prédilection : l'homme en tant que jouet de forces qui le dépassent.
Sur la fille de la Baie, tous mes personnages sont aveugles du fait des rayons trop puissants du soleil (à cause que la couche d'ozone n'est plus, on est dans du post-apo) : ça permettait un défi d'écriture, une sorte de vaste synesthésie, où la vue notre principal sens, n'était plus utile, et d'ainsi être sur un mode plus poétique. [au passage, merci pour la publication, j'avais totalement oublié l'existence de cette nouvelle, et j'ai été ravi, quoiqu'à la relecture, je l'ai trouvée moins bonne que dans mon souvenir]
Mais dans les deux nouvelles, le résultat reste médiocre.




Le futur plus proche est plus intéressant, puisqu'il nous permet autant d'extrapolations que notre monde comprend de thèmes possibles [j'ai lu de bonnes nouvelles associant du polar à la SF].
Cependant, je me permettrais une gueulante. Dans les media, il ne passe pas un jour sans qu'on nous sorte un roman d'anticipation de dessous les fagots, par exemple le dernier Lolita Pille, et à chaque fois, j'ai le poil qui sur ma peau se redresse.
En général, les auteurs de romans d'anticipation placent leurs histoires dans un futur proche histoire de n'avoir pas à décrire la réalité, et donc de s'économiser une recherche, tout en prétendant parler de notre société en en décrivant le futur.
Je trouve cet exercice plutôt minable. Tant qu'à faire, écrire de la SF nécessite de l'enthousiasme, c'est l'ambition d'inventer un univers, qui bien que fictif, doit être sensé et cohérent (voire particulièrement sensé et particulièrement cohérent).
D'autant qu'en se plaçant sur un futur proche, en extrapolant quelques clichés SF bêtement [les clichés SF ont été construit dans les années 50...], on a de fortes chances de se tromper et lourdement [je te rejoins Chwip].
Le premier exemple qui me vienne est évident : vous nous parlez de nano-technologies, je m'excuse, mais la nano-technologie est déjà sur le marché. Vous voyez ces T-shirts qui ne sont jamais mouillés par la transpiration ? Eh bien ce sont des nano-technologies qui le permettent. Autant vous dire que des systèmes plus complexes seront vulgarisés dans moins de dix ans, et la pointe actuelle de la technique permet des choses déjà extraordinaires.

Merci pour vos réponses !
Je rebondis juste sur quelques points, et plus tard, je donnerai mon avis sur cette question.

A propos des thèmes accompagnant "futur lointain" et "futur proche" : si j'ai mis des thèmes, c'était principalement pour cibler un peu ceux qui s'y perdraient, dans ces genres "génériques". Mais je suis d'accord à propos du post-apo : l'apocalypse en elle-même peut se trouver dans un futur proche (c'est plus effrayant de voir chuter un monde qui nous ressemble plutôt qu'un monde trop éloigné du notre) ; par contre l'après-apocalypse, lui, se situe souvent dans une ère entre un futur proche, et un futur lointain...
Les idées "bateau" proposées n'étaient donc que pour éclairer un peu la piste. De même, quand j'employais "nano-technologie", c'était bien pour décrire des procédés encore à l'état de projet ou de rêve, plutôt que des innovations réelles et présentes. On met d'ailleurs un peu n'importe quoi dans ce terme, mais à l'origine, il ne désignait que la miniaturisation de mécanique et d'électronique, et non la "miniaturisation" dans son ensemble. Cette nano-technologie a théoriquement des fins plus médicales, et est sensée rassembler l'ensemble des techniques, machines, éventuellement bio-machines, que l'on pourra introduire dans le corps humain pour guérir ou réparer tel ou tel anomalie. Ces équipements serviraient essentiellement de support à notre système immunitaire.
C'est un peu comme dire que les intelligences artificielles existent déjà... Ca reste présomptueux ; nos machines actuelles ne sont par exemple pas assez évoluées pour acquérir la faculté de "choisir"...
Après tout, si ces avancées technologiques arrivent dans le siècle suivant, ne rentrent-elles pas quand même dans la science-fiction ? Le futur ne commence-t-il pas à la seconde après celle qui s'écoule présentement?

Je reste assez sceptique quant à l'utilisation de "imagination limitée". Non pas que l'homme doit se prendre pour un dieu, non, mais je trouve ça "choquant". Doit-on penser que tout a été écrit aujourd'hui? Que tout ce qui sort est forcément "banal"? qu'il faut toujours chercher dans l'hyper original pour ne pas être lassé de la création de l'Autre ?
Pour continuer dans le "générique", on s'amuse souvent à dire que Platon, Aristote et Cie ont tout dit au niveau de la philo, et que les suivants n'ont fait que développer, ou écrire à leur époque, ce qui avait déjà été mis en avant... Alors, pourquoi d'autres personnes ont écrit, après eux ? Pourquoi sont-ils lus ?
Je suis partisan de l'idée qu'il suffit que quelqu'un écrive quelque chose pour que cette création soit originale. Par le simple fait que c'est lui qu'il l'a écrite. Après, au regard de sa touche personnelle, on découvre une oeuvre nouvelle. Tout le monde n'a pas la facilité de dégager sa touche personnelle de la multitude de références, piochées de son vaste inconscient, qui constituent son roman, mais quand un écrivain y arrive, tant pis si ce qu'il a écrit a déjà été écrit, et réécrit, car son oeuvre sera quand même belle.

J'ai pris soin dans ce sujet de parler de "futur", et non de "science-fiction".
"le futur lointain est finalement assez limité. On n'a pas idée de ce que sera le futur, et sans doute il nous décevrait". C'est, je trouve, particulièrement triste de penser cela. Pour ma part, quand j'imagine le futur, je ne cherche pas à savoir s'il sera crédible ou pas, si "ça se passera ainsi", non. Je ne cherche qu'à imaginer un futur dans lequel j'aime bien m'y réfugier.
"Science-fiction", peut-être, doit garder sa "science" (pseudo-science), mais alors, peut-on écrire une histoire se passant dans le futur, sans que celle-ci entre forcément dans le genre "science-fiction"?
Peut-être que c'est cette forme de liberté qui manque à un certain nombre d'auteurs... "Je dois écrire quelque chose que personne n'a encore imaginé", "je dois écrire sur telle avancée technologique, projetée dans un futur, pour montrer son impact sur la société", "je dois écrire quelque chose qui n'est pas bateau", "je dois écrire quelque chose qui donnera une nouvelle voie à la science-fiction"...
S'il y avait un dieu de la lecture, quelqu'un qui aurait lu TOUTES les lignes du monde, un super-bibliothécaire de la bibliothèque de Babel, alors, il pourrait nous dire que chaque écrit est composé d'une multitute de plagiats. Phrases, morceaux de phrases, paragraphes, livres entiers ! Peut-être tout a-t-il déjà été écrit.
Faut-il s'arrêter là ? Chercher jusqu'au suicide, ce qui ne serait pas lassant à lire ? Ce snobisme littéraire entrave la création...
Il suffirait juste de se dire : "oh, ces lignes ! C'est moi qui les ai écrites..."
La réelle passion de faire passer du "moi" dans ces lignes, sauverait le récit...
Et si ces lignes ont une certaine valeur littéraire (comprendre : elles sont lisibles), alors il y aura toujours une population pour les lire, une population qui n'a pas lu Barjavel ou Heinlein, une population, qui, de toute façon, ne pourra pas tout lire...

Je suis peut-être trop optimiste, trop idéaliste, mais je préfère mettre un peu de poids dans ce côté de la balance face au mouvement sceptique contemporain qui domine en ce début de 21e siècle !

(pour rebondir sur le futur proche : je trouve, comme Chwip, qu'il reste moins libre que le futur éloigné, pour la raison, en effet, qu'on ne peut que se plier aux codes et aux exigences de produire une histoire censée et cohérente, et beaucoup écrivant la dedans devraient sans doute rester dans le polar présent, ou chercher à se plonger dans un avenir plus lointain )